jeudi 21 mai 2009

Minuit une minute huit secondes

Plutôt saoul que seul implique une écriture spéciale, connue, avec des noms d’auteurs connus dans un genre de vie connue, rabâchée et usée, l’alcool les filles et les mots, les putes et les phrases, les verres, les clichés, le folklore et les vers, donc l’alcool au présent est une seconde de vieillesse, une seconde muséale dans le passé d’une littérature d’alcooliques écrivant sur l’alcool et les putes, écrivant sur l’alcool de l’écriture et les filles dans des pages qui restent ouvertes toutes la nuit. L’heure de fermetures des pages n’existe pas, la page est ouverte avec des arrières salles sombres la journée, imperméable au jour, à la lumière de la journée, des salles de musées livresques hyper connus, au sol ravagé par les touristes. Les touristes : les lecteurs d’aujourd’hui qui se moquent des statues qui continuent à vivre là et à boire et à fréquenter les putes alors qu’il est tard, il est très tard dans l’Histoire et les putes sont le passé, sont des passes droits vers le passé, les putes sont les victimes des auteurs pour les auteurs qui ne vont plus aux putes car les putes sont des victimes, c’est connu, on ne va pas aux putes comme on va à la bibliothèque, on va à la bibliothèque pour les putes anciennes, les putes sacrées des anciens auteurs sacrés, les putes des livres mais pas les vrais, pas aujourd’hui, c’est dégueulasse de faire ça, mais un auteur qui va aux putes à cette seconde n’est pas un auteur mais un client, un monstre, un ignoble, un glauque, un taré, un psycho, un ringard, c’est un ringard surtout, un paumé ringard, un passéiste, un auteur présent qui parle du passé et qui veut flamber dans les mots. Pauvre auteur, ses pages ouvertes à pas d’heure et les putes qui attendent leurs mots pour se savoir écrite, encore une fois. Il faut faire soigner le texte par la violence et la dénonciation des putes victimes et des clients bourreaux. Mais le texte continue, le texte à des lecteurs spéciaux, hors temps, hors civilisation, hors barbarie, hors tout, le texte est post-mortem, il vit, il est vivant dans les claques, dans chaque seconde des rues et des claques en bord de mer qui sent le sel – l’iode, l’algue, l’encre - et l’égout. Les quatre éléments de l’Art en bord de mer, du beachart en bord de claque : le sang, le sperme, la pisse, la merde. Les putes lisent, les clients lisent, les putes lisent dans les yeux des clients qui lisent dans les yeux des putes, les putes se lisent entre elles, les clients se lisent entre eux, l’auteur écrit ce qu’il lit dans les yeux des lectrices et des lecteurs, les putes attendent l’auteur, les clients attendent les lectrices, les yeux sont les clients des putes.

2 commentaires:

  1. Tu viens d'inventer un mouvement littéraire : "le Post-mortemisme", qui consisterait à écrire depuis un au-delà théorique restant à définir. Volodine est un nain, car son au-delà est resté géographique. Creuse...ça m'intéresse...
    Mikael

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  2. Merci beaucoup pour l'invitation Mikael, mais la nécrophilie, c'est ton plaisir, pas le mien. Non, moi, ma faiblesse, ce sont les stations spatiales proustiennes...J'écrirais bien le manifeste de la Nécroaérophilie pour te consoler, mais il y aurait au moins 10 volumes alors...La bise quand même ?

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