jeudi 14 mai 2009

Minuit une minute

Ne pas inscrire sur les pierres tombales les dates de naissance et de mort, mais le nombre de signes écrits, le nombre de signes vécus par les individus, preuve d’écriture dans la vie.

Minuit cinquante neuf secondes

Douter du texte comme on met en doute l’horaire que l’on consulte – être en retard, en avance. Le doute, un genre de temps textuel, ou de texte temporel. Etre à l’heure dite au moment, à l’instant de sa diction. La diction d’une minute en une minute. Impossible – et déjà dit, plus bas, tout à l’heure, c’était il y a quelques secondes déjà, quelques milliers de signes.

Minuit cinquante huit secondes

La vie marchande de l’écrit-seconde, de l’ES, de l’écriture du temps, est une vie aléatoire, suspendue, dont le modèle économique, à cette heure encore matinale du texte, n’est pas encore au point, est encore expérimentale, en phase d’expérimentation – le tout en une seule phrase, il faut le signaler à l’attention du lecteur, du patronat qu’est la communauté des lecteurs, communauté patronale parfois superficielle, et qui traite mal son employé-auteur, en ne voyant pas, en lisant trop vite, ce qui, dans un écrit du temps, est une faute, une faute grave de patron qui dirige son entreprise de lecture.

Minuit cinquante sept secondes

Si le temps est un genre, dire genre T, et dire sous-genre st - pour sous-genre de temps dans le cas d'un temps interne au temps principal qui est T -, et dans sous-genre st, dire strc - pour sous-genre de temps rétro-chronologique - c’est une formalisation certes, mais c’est un signe en lui-même, c’est un idéogramme, un idéogramme à éléments latins dont la décomposition donne un concept, ou une expression, ou une phrase, selon la complexité choisie de l’idéogramme élaboré. Il existerait ainsi des règles d’idéogrammatisation du latin dont l’acronyme, l’exposant, la majuscule et la minuscule, le gras, l’italique et le souligné constituent des bases graphiques potentielles. Quel rapport au temps, à l’écriture du temps, au temps écrit ? Un acronyme est un genre de parataxe graphique, c’est une écriture à grande vitesse, une EGV, qui, appliquée à la seconde textuelle, permettrait d’écrire virtuellement plus de signes que ceux effectivement inscrits. Un genre de fuite en avant pour écrire de moins en moins tout en continuant de vivre d’écrits.

Minuit cinquante six secondes

Il peut exister un décompte linéaire – une histoire linéaire, une histoire racontée du début à la fin. Il peut y avoir, au sein d’un décompte linéaire, des brusques décalages, des ruptures chronologiques, des anticipations et des anachronies, des passages d’un temps dans un autre au sein d’un temps majoritairement orienté du début vers la fin. Il peut y avoir des décomptes anti-linéaires, désordonnés ou d’apparences désordonnés, organisés selon un autre rythme que la linéarité. Il peut y avoir aussi un décompte rétro-chronologique, de la fin vers le début. Il peut aussi y avoir des apparences de linéarité et d’anti-linéarité ou de rétro-chronologie. Partant ainsi de neuf, ou de trois, prononçant neuf ou trois jusqu’à un pour, à zéro, déclencher le départ, c’est une rétro-chronologie apparente, puisqu’en fait, l’objet du décompte, le départ, est linéaire. Concevoir dans le texte, un décompte de ce genre annonçant l’imminent passage d’une seconde à l’autre, ou d’un groupe de secondes à un autre groupe – d’une minute à l’autre ou d’une heure à l’autre – est une rétro-chronologie apparente, elle-même incluse dans une chronologie linéaire – la suite nommée des secondes dans l’ordre naturelle de leur apparition. Dans le grand genre du temps, le genre T, il y aurait de multiples sous-genres de temps, des genres st – genre strc, pour sous-genre rétro-chronologique, par exemple – dont l’emploi dans le texte du temps permettrait des amplifications de vie par l’écriture. Temps libres dans les règles du temps, dans la régulation du temps écrit.

Minuit cinquante cinq secondes

Le temps : le flux d’écriture ; le temps lui-même, le terme temps, les noms du temps quotidien – seconde, minute, heure -, inscrit dans le flux d’écriture, comme une simple portion du temps textuel. Le temps lui-même inscrit dans le temps du texte en une seule seconde de texte – une seule seconde récapitulant tous les noms du temps dans son texte.

Minuit cinquante quatre secondes

Que chaque seconde écrite soit une proposition de mode de vie dans et par le texte, une manière de vivre l’écriture d’un texte et l’écriture quelque soit le texte écrit – comme baiser, boire, manger, dormir -, cela ne fait aucun doute, c’est l’évidence même de la seconde, l’heure exacte, l’exactitude d’une horaire textualisée de la première à la dernière seconde.

Minuit cinquante trois secondes

Il peut exister une structure seconde au sein d’une structure première. Il pourrait exister une structure nouvelle, changeante, évolutive, au sein d’une structure programmatique, la suite complète des quatre vingt six mille quatre cents secondes d’une journée de vingt quatre heures et mille quatre cents quarante minutes. Cette structure nouvelle pourrait dissocier le texte de la seconde ; un texte pourrait être commun à deux ou plusieurs secondes ; un texte pourrait ainsi enjamber une seconde pour aller dans l’autre. Il y aurait un ensemble A – une seconde quelconque dans la suite des secondes, par exemple minuit cinquante deux secondes – et un ensemble B – la seconde suivante, minuit cinquante trois secondes – et un ensemble C – minuit cinquante quatre secondes – et un ensemble D, E, F, G, et cela jusqu’à la dernière seconde de la journée, minuit. Et il y aurait un premier ensemble commun à A et B qui serait AB ; un ensemble commun à B et à C qui serait BC, ceci jusqu’au dernier ensemble commun à vingt trois heures cinquante neuf minutes, cinquante neuf secondes et minuit. Ces ensembles communs n’occuperaient pourtant pas la totalité d’une seconde, qu’ils scinderaient en quelque sorte en deux, le texte de la seconde minuit cinquante trois coupée en son milieu par, en première partie, l’ensemble AB, et en secondes partie par l’ensemble BC. Non. Il y aurait une partie du texte de minuit cinquante trois secondes - par exemple -- c’est une seconde choisie de manière aléatoire comme pouvant être une seconde-modèle, une seconde-exemple dans quatre vingt six mille quatre cents exemples possibles --, une partie de cette seconde, partie plus ou moins vaste, qui serait considéré comme strictement appartenant à l’ensemble minuit cinquante trois secondes. Cette partie ne serait commune ni à AB ni à BC. Elle serait plus ou moins vaste car, soit elle serait de dimension équivalente à AB et BC, c’est-à-dire qu’elle diviserait la seconde en trois tiers, en un tercet de blocs de texte équivalents en nombres de signes, soit ce serait un texte beaucoup plus vaste, qui relèguerait ainsi AB à être un texte introductif/conclusif des secondes présente/précédente et l’ensemble BC à être un texte conclusif/introductif des secondes présente/suivante. Ou l’inverse. Ce qui suggère aussi que chaque ensemble commun soit des ensembles ouverts et fermées selon un mode parenthétique particulier – plutôt que des parenthèses, trop utilisées partout, on préférera le tiret qui, dans sa graphie, renvoie à la ligne -- la ligne d’écriture -- chaque nouveau tiret indiquant une précision nouvelle. Ou bien le texte strictement appartenant à la seconde serait plus court que les textes des deux ensembles communs.
On le devine aussi, chaque ensemble commun à deux secondes aura la propriété d’occuper, de couvrir, cet espace mystérieux qui sépare une seconde d’une autre. Cet espace peut être extrêmement court ; mais il peut être aussi extrêmement long, d’une longueur qui dépasse la journée, en tant que texte. Donc le texte commun AB peut très bien ne pas apparaître complètement dans les deux secondes qu’il réunit. Il peut très bien n’apparaître qu’à titre d’extraits d’un texte plus vaste inscrit dans l’espace séparant une seconde d’une autre. De fait, un ensemble commun est une possibilité d’annexer au temps des secondes, les différents temps qui lui échappent, c’est-à-dire les différentes variétés de temps intermédiaires aux unes et aux autres. Ceci afin que rien ne passe qui ne soit texte, et rien qui soit passage du temps qui, d’une manière ou d’une autre, ne fasse l’objet d’une mise en texte, c’est-à-dire d’une organisation de la vie en lignes, paragraphes ou séquences. Qu’en plus du passage indifférencié, et conservé dans son indifférence passagère, de la suite impersonnelle des secondes d’une journée ordinaire, on trouve intégrées les interstices qui séparent toute unité divisée. Et, parallèles ou en surplomb, les différents types de formes d’organisation de ce passage des unités et des interstices d’unités, leur formes, qui sont des formes de vie textuelles, une forme de vie par le texte. Structures vivantes de texte.

Minuit cinquante deux secondes

Un mode de vie étant une suite de gestes répétés, d’actions répétées jusqu’au rituel, un mode de vie étant un mode de rythme permettant l’appréhension du nombre dans l’existence, du caractère jouissif du nombre dans le vivant, nombre qui permet la composition, la décomposition, la recomposition des gestes et des actions en ensemble plus ou moins vastes et changeants, un mode de vie dans le texte peut donc être la division d’un texte en une journée commune à toutes les journées terrestres et à tous les individus, par la seconde, de la première à la dernière. Une seconde étant l’unité minimale d’inscription de la journée, chaque seconde est en même temps frontière, frontière entre le plus grand, la totalité d’une journée, et le plus petit, la division d’une seconde par le texte. Le texte est divisible et la seconde se divise à son tour. De fait une seconde peut-être le compte rendu d’une journée, d’une année, d’une vie ou de plusieurs. Elle peut-être moins qu’une seconde ou être homothétique à la seconde.

mardi 12 mai 2009

Minuit cinquante et une secondes

Un - Une seconde de vingt quatre textes – Deux - Une seconde de vingt quatre textes peut-être composée de plusieurs façons – Trois - Une seconde de vingt quatre textes peut-être composée d’un texte unique divisé en vingt quatre séquences – Quatre - La division d’un texte en vingt quatre séquences peut être la simple coupe d’un texte en vingt quatre partie sans travail sur la coupe – Cinq - Un texte – Six - coupé – Sept – En - Huit - vingt quatre troncs – Neuf - sans travail sur la coupe – Dix - Ou la coupe du texte peut être obtenue de telle manière qu’à chaque progression d’un texte le long des vingt quatre coupes, le texte s’allonge – Onze – Le texte s’allonge en repartant du début et en répétant chaque fois le texte précédent en lui ajoutant un mot ou une phrase – Douze – un mot ou une phrase de telle manière qu’à la fin le texte soit complet et compréhensible – Treize - Mais une seconde peut être aussi divisée en vingt quatre textes dissemblables – Quatorze - Sans rapport l’un avec l’autre – Quinze - Ou bien une seconde peut être aussi le passage d’un texte un dans un texte vingt quatre à travers vingt deux textes intermédiaires – Seize – Passage dont l’insensibilité progressive n’empêche pas la conservation du mécanisme initial – Dix sept – Passage se faisant généralement par des reprises – Dix huit – Des reprises de termes d’un texte à l’autre le long des vingt quatre étapes – Dix neuf – Reprises dont le sens change à mesure du progrès d’une séquence de jeu – Vingt - Jeu dont l'objet peut-être d’amener la balle proche du but adverse afin de marquer – Vingt et un - Approche dont les centres vers le but adverse échouent parfois aboutissant à de longues balles hésitantes au dessus du terrain – Vingt deux - Longues balles hésitantes dont la reprise constitue une volée – Vingt trois – La reprise de volée étant souvent spectaculaire, unique, cinématographique – Vingt quatre - Reprise de volée dont on ne se lasse jamais et qui se trouve souvent répétée sur les écrans, au ralentie, presque vingt quatre images par seconde.

Minuit cinquante secondes

Vingt quatre textes par seconde est une correspondance, c’est une correspondance avec la forme cinématographique, une correspondance abusive car une seconde écrite ne suppose pas qu’il faille vingt quatre textes, vingt quatre textes pour en saisir le mouvement, c’est la lecture qui rend mobile le texte, c’est la lecture qui rend sonore la répétition, il n’y a pas besoin non plus de vingt quatre mots par seconde pour animer un texte, pas plus qu’il ne faut vingt quatre syllabes par seconde, le nombre vingt quatre appliqué à l’écriture d’une seconde est une correspondance abusive avec le mouvement de l’image mais inévitable, car la correspondance est un outil du texte, il y a donc dans une texte divisé en secondes des correspondances abusives mais inévitables avec d’autres disciplines, des associations d’idées, et dans l’idée de seconde il y a l’ idée d’image, vingt quatre images pour créer une animation pour l’œil, mais la vitesse de l’œil captant un texte n’est pas équivalente à la vitesse des images projetées pour l’œil, de sorte qu’une seconde de vingt quatre textes est une correspondance.

Minuit quarante neuf secondes

Un. Qu’est qu’Un sachant qu’Un n’est pas une unité unique mais un groupe d’unités unies. Un est une illusion de Un, une ombre, un faux. Deux. Deux est la somme de deux Uns et le nom unique de cette somme, c’est donc une unité comme Un qui ne se cache pas derrière l’illusion d’un Un unique. Deux est donc Un. Deux est un Un honnête. Trois est la somme de trois Uns ou d’un Deux et d’un Un. Après Deux, toutes les unités fonctionnent presque comme un Deux, soit la somme d’unités franchement perceptibles car jamais désignées par Un seulement mais par le nombre variable d’unités qui compose cette somme. Donc, tous les Uns sont honnêtes sauf Un.

Minuit quarante huit secondes

La chevelure, le cheveu, le nombre des cheveux perdus, le décompte des cheveux, longs, courts, mi-longs, dégradés, au carré, bouclés, ondulés, raides, blancs, blonds, bruns, noirs, lisses, le compte des cheveux est une activité possible et similaire à l’action d’écrire les secondes l’une après l’autre dans l’ordre ou le désordre, est une action similaire au compte et à la description géométrique, géologique, chromatique des grains dans un sable, ou le compte et la taxinomie des herbes dans un gazon, c’est une activité modeste et précise, une activité obsessionnelle, une forme de perfectionnement par le rythme et la répétition d’une certain nombre de gestes dont la variation l’emporte sur la ressemblance car il n’existe pas deux tirs à l’arc semblables ou deux pas semblables, ou deux brasses, ou deux coupures de rasoirs sur la joue, ou deux textes identiques, même si l’un est la copie de l’autre, chaque copie étant datée, la date différencie le texte.

lundi 11 mai 2009

Minuit quarante sept secondes

Puisqu’une seconde est l’unité standard du présent, qu’elle signifie et désigne le présent dans sa plus complète dimension, l’écriture d’une seconde doit, d’une manière ou d’une autre, désigner le présent de l’écriture, c’est-à-dire l’écriture elle-même, ce qui n’est pas une fermeture mais une ouverture considérable, difficile à assumer même, tant les désignations deviennent multiples, désorientées, distendues ( comme un plan brusquement étagés en plusieurs dont l’imbrication constitue la phase initiale d’appréhension (( phase décomposée elle-même dans la captation des étages l’un après l’autre ((( isolés d’abord puis reliés ))) à travers un parcours indirectement descriptif )) après quoi on peut raconter toutes les histoires possibles dans ce décor légèrement hétérogène).

Minuit quarante sept secondes

Que chaque seconde apparaisse si différente les unes des autres qu’elles semblent toutes appartenir à des temps, à des jours différents. Qu’à l’extrême fin de la journée, à minuit, un jour complètement écrit soit une anthologie de secondes prises non seulement dans plusieurs jours d'un narrateur mais aussi chez plusieurs narrateurs possibles, autant de narrateurs que possible, empruntés au présent, au passé et au futur, ce qui implique l’invention d’individus, d’êtres vivants non encore procréés dont la preuve d’existence serait la ou les secondes imaginées et qui les désignent.

Minuit quarante six secondes

Une seconde dite à voix haute diffère d’une seconde lue sans voix, une seconde muette mais audible par celui qui la lit pour lui-même, qui diffère elle aussi d’une seconde dite à voix basse et lentement, contrastant aussi avec la vitesse d’écoute du lecteur, lequel ne lit plus mais entend, c’est-à-dire qu’il capte à mesure sans contrôle, tout ce qui lui échappe restera échappé, sans possibilité de reprise, sinon par la répétition peut-être déformée d’un ou plusieurs acolytes auditeurs. Je doute qu’à voix haute, même claire, audible, d’une grande pureté sonore, d’une épuration des phonèmes parfois écorchés que la voix haute provoque dans le texte qu’elle transmet, je doute que la phrase précédente puisse être parfaitement entendue, comprise en une seule fois par l’auditoire, même le plus attentif, le plus gagné à la cause de l’écriture du temps, ceci à cause des sons qui, sans signes distinctifs de sens, saccage le système assoupli pour passer à l’écoute, phénomène partagé par la phrase présente, ce qui provoque la phrase suivante, conclusive, si vous suivez. Une seconde d’inattention provoque vite le ouï-dire, peut- être aussi le ragot, ou pire, le radotage, la ratiocination ou le rejet.

Minuit quarante cinq secondes

Une seconde est une séquence d’écriture plus ou moins longue et liée aux secondes limitrophes d’abord, à toutes les secondes d’une journée ensuite, avec lesquelles elle entretient des rapports d’homothéties ou d’homophonies évolutives aboutissant vite à une hétérotopie compulsive perceptible au sein de la seconde elle-même, dont la phrase terminale s’éloigne parfois prodigieusement de la phrase initiale - on ne néglige pas non plus la probabilité qu’au sein d’une même phrase, les syntagmes soient disjoints entre eux, malmenant la logique, égarant le lecteur, brouillant le temps.

Minuit quarante quatre secondes

Un genre d’océan. Une sorte de matière océanique, sablonneuse, huileuse, polluée comme doit l’être un océan réaliste, bourré de plomb, d’acides et de plastiques, avec dedans des êtres vivants modifiés, des mutants, des mutations de plantes, des croisements de règnes, le minéral, le végétal, l’animal, l’architectural, le tout exhalant des odeurs diffractées, puantes, âcres, salines, iodées, bonnes, épicées, cariées. Les genres littéraires, artistiques, scientifiques, culturels – cuisines, mode de vie, agricultures - développés par les civilisations de cette planète secondaire dans le système des quatre vingt six mille quatre cents astres qui composent l’Empire galactique ( autrefois une république, plus loin encore une fédérations de micros-systèmes planétaires, avant encore, des planètes indépendantes qu’un passé lointain avait connu divisé en pays, régions, villes, villages, tribus, familles, individus ), ces genres, détaillés l’un après l’autre, révèlent une obsession du temps diffracté, exploré, allongé, proportionnel à l’importance de cette planète dans les annales impériales : à peine plus d’une seconde, comme dite en pensant par un chambellan pressé au milieu d’une séance fastidieuse d’un conseil gouvernemental expédié en pleine période estivale – la cour absente, l’Empereur à la mer, les ministres en vacance.

dimanche 10 mai 2009

Minuit quarante trois secondes

Seconde didascalique. En marge du temps, indiquer les moyens d’arrêt, d’accélération ou de décélération, les moyens de transports dans le temps. Toujours avoir du texte en marge quand on s’interroge sur l’heure.

Minuit quarante deux secondes

La durée de lecture d’une seconde est composée de multiples secondes, elle peut être lue lentement, en marquant artificiellement des accents, en allongeant démesurément des syllabes, en élisant certains phonèmes plus longuement que l’habitude, en prolongeant délibérément des sons. Elle peut être lue plus lentement qu’elle n’a été écrite, subissant des retours, des arrêts, des reprises en amont. La durée de lecture d’une seconde peut-être plus rapide que l’écriture d’une seconde en occultant des syllabes, en provoquant des parataxes, en sautant des lignes secondaires. La durée de lecture peut être vraisemblable, adéquate au modèle abstrait de lecture ordinaire. La seconde peut durer plus longtemps qu’elle ne dure dans la lecture et la lecture plus longtemps qu’elle ne dure dans l’écriture et l’écriture durer plus lentement qu’elle ne dure dans la seconde et la seconde plus longtemps qu’elle ne dure dans l’écriture de la lecture ou la lecture de l’écriture. Au sein d’une seconde, la lecture peut être lente d’abord, ordinaire ensuite, rapide à la fin. Elle peut être l’inverse. La combinaison du temps de lecture et d’écriture compose la durée moyenne d’une seconde écrite et lue.

Minuit quarante et une seconde

Une seconde d’écriture peut être le portrait exact de la seconde pendant laquelle on l’écrit, impliquant l’écriture de la seconde seulement, sans le texte qui la suit, et dans cette tentative de correspondance permanente entre le temps réel et l’écriture du temps, un décalage se produit qui s’accentue, produisant un troisième temps, celui du temps réel mis pour écrire telle portion du temps, puisqu’inévitablement, une telle équivalence est impossible, il faut toujours beaucoup de temps pour écrire le temps.
Il propose donc d’écrire en direct et en public pendant un temps donné, par exemple vingt minutes, les secondes les unes à la suite des autres à partir de l’heure réelle où il débute son labeur. Le résultat diffère à chaque nouvelle action de ce genre, le nombre de secondes écrites variant en fonction de l’intensité et de la vitesse de sa frappe ce jour là. On le paye pour ça, pour l’écriture, en direct, d’un nombre non prémédité de secondes pendant un temps prémédité d’écriture.